L'IA peut sauver le legacy code
Dans toute grande boîte tech, on vous dira un jour : « Ne touche pas à ça, c’est du legacy code. » Pour moi, c’était chez une multinationale télécom au Sénégal. Des applications vitales pour des millions de clients mais un code si vieux, si fragile, et surtout… si mal documenté qu’on préférait le laisser dormir que risquer un bug. Résultat ? On empilait les patchs à la va-vite, on éteignait des incendies, et à chaque nouvelle fonctionnalité, c’était comme jouer à Jenga avec des pièces mouillées.
Et le pire ? À chaque rétrospective, la même rengaine : « On n’a pas le temps pour une release technique. » Résultat: une dette technique monstrueuse, et une équipe qui vieillit plus vite qu’un serveur sous Windows 95.
Aujourd’hui, l’IA promet de changer la donne. Non pas avec des promesses vagues mais avec des outils concrets qui analysent, documentent, expliquent et même prédisent les comportements du code. C’est un peu comme avoir un collègue infatigable, qui comprend tout, ne se trompe jamais et ne partira jamais travailler chez la concurrence.
Qu’est-ce qu’un legacy code ?
Le terme peut faire peur. Littéralement, c’est du « code hérité » : une base logicielle qu’on continue d’utiliser parce qu’elle est trop précieuse pour être abandonnée… mais trop risquée pour être modifiée à la légère.
Dans mon équipe, on avait des modules datant de plus de 10 ans. Écrits par des devs partis depuis belle lurette et certains guerriers qui sont encore la pour tenir la forteresse. Des fonctionnalités vitales: facturation, gestion des abonnements, portabilité des numéros. Et pourtant, aucune doc à jour. Parfois, juste un vieux fichier Word planqué dans un SharePoint poussiéreux.
Pourquoi garde-t-on ce code ? Parce qu’il fonctionne. Parce qu’il fait tourner un business qui rapporte des millions. Et parce que tout réécrire coûterait une fortune, prendrait des années et finirait souvent… par créer un nouveau legacy.
Les conséquences de la dette technique
Quand on parle de legacy code, on parle surtout de dette technique. C’est comme un crédit revolving : chaque « on fera ça plus tard » accumule des intérêts. Sauf qu’ici, ce ne sont pas des CFA, mais des heures de debug, des nuits blanches et des taches qui s’empilent.
Dans notre équipe, on passait parfois deux semaines à comprendre pourquoi une simple modification avait tout cassé. Un script oublié, une variable globale réutilisée ailleurs… Et sans documentation, tout devient devinette. Plus personne n’ose toucher certaines parties du code. On crée donc des contournements, des rustines, et on s’enfonce encore plus.
Et quand un dev expérimenté claque la porte ? C’est tout un pan de la mémoire vivante qui disparaît. Résultat: onboarding chaotique, bugs fantômes, et un moral en berne.
Pourquoi la documentation est un talon d’Achille
« On n’a pas le temps de faire une release technique » = on n’a pas le temps de documenter.
La documentation devrait être un investissement, pas une perte de temps. Pourtant, dans la vraie vie, c’est souvent le premier sacrifice quand les deadlines approchent. On se dit « on écrira ça plus tard ». Sauf que « plus tard » devient « jamais ». Et au bout de 5 ans, personne ne sait pourquoi telle table SQL existe ou pourquoi telle fonction retourne NULL au hasard.
Dans une de mes expériences, je me souviens d’avoir mis trois semaines à comprendre un module de gestion d'un formule d'abonnement. Trois semaines à poser des questions, fouiller les docs ( et oui le code n'était pas sur un repo avec des commits Git), faire des tests. J’aurais pu ajouter une doc ? Bien sûr. Mais au final, on m’a collé sur une nouvelle feature. Et rebelote.
L’arrivée de l’IA : une lueur d’espoir
Alors pourquoi ça change aujourd’hui ? Parce qu’enfin, l’IA est assez mature pour lire, comprendre et même expliquer le code à notre place.
Prenez Swimm, la startup cofondée par Omer Rosenbaum. Leur promesse : votre doc devient vivante. Grâce à l’IA, elle se met à jour en temps réel quand le code change. Fini les pages obsolètes.
Mieux encore: dans votre IDE (VS Code ou autre), l’IA peut survoler une fonction, analyser ses dépendances, résumer son rôle. Vous comprenez en quelques secondes ce qui vous aurait pris des jours avant.
C’est un vrai assistant: il lit les fichiers, les relie entre eux, vous montre qui dépend de quoi. Et quand vous faites une refacto? L’IA vous alerte sur les impacts potentiels, vous suggère même des tests.
L’IA comme compagnon de navigation
Imaginez ouvrir un fichier AccountController.java sur un monorepo colossale. Avant, vous cherchiez pendant des heures : « Mais qui appelle cette fonction ? Est-ce qu’elle est encore utilisée ? Si je la change, où ça casse ? ». Avec un assistant IA, plus besoin de tout tracer à la main.
L’IA cartographie le code: elle détecte les dépendances, les usages, les liens entre modules. Mieux: elle vous montre visuellement comment une modification ici impactera un autre service là-bas. C’est comme passer d’une vieille carte papier à Google Maps version code.
Quand j’étais chez la compagnie télécom, on avait un monorepo géant avec des librairies partagées. Un cauchemar parfois pour les devs. Rien qu’un changement de variable globale pouvait planter tout un service client. Si on avait eu un outil d’IA pour visualiser ces liens, on aurait évité bien des nuits à éplucher des logs pour trouver le coupable.
Automatiser la génération de documentation
Le cœur du problème: la doc manquante ou périmée. L’IA peut désormais générer une documentation contextuelle.
Comment ça marche ? Elle lit le code, identifie les fonctions, les classes, les modules. Ensuite, elle génère automatiquement une description: à quoi ça sert, quelles sont les entrées/sorties, quelles dépendances.
Encore mieux, à chaque commit, la doc se met à jour. Finis les Confluence poussiéreux et les Google Docs jamais relus.
Certains outils intègrent même ça directement dans le pipeline CI/CD. Chaque pull request est analysée, la doc est ajustée, et hop ! tout le monde reste aligné.
Gagner du temps pour les vraies releases techniques
Dans mes aventures en entrprises, on répétait comme un mantra : « On n’a pas le temps pour une release technique. » En réalité, on n’avait pas le temps car la base était trop risquée à modifier. Cercle vicieux.
L’IA brise ce cycle. En automatisant la doc, la visualisation et même des refactorisations, elle libère du temps pour faire enfin ces chantiers techniques.
On peut planifier une release pour réorganiser un module, supprimer du code mort, ajouter des tests unitaires — sans la peur de tout planter. La dette technique arrête de gonfler comme une bulle spéculative.
Réduction des bugs et meilleures refactorisations
Modifier du legacy code, c’est comme retirer une pièce d’un château de cartes. Une dépendance oubliée, et tout s’écroule. Les bugs sont parfois invisibles… jusqu’en prod.
Grâce à l’IA, chaque modification peut être simulée. Elle anticipe les impacts : « Attention, cette méthode est aussi utilisée ici, ici et là. » Elle peut même suggérer des tests pour couvrir les cas critiques.
Quand j’ai bossé sur un vieux module de facturation, une seule modif avait provoqué une cascade de bugs sur d’autres microservices. Trois jours pour tout corriger. Si j’avais eu un assistant IA pour pointer les dépendances cachées, j’aurais gagné du temps et quelques cheveux blancs.
Conclusion
Le legacy code est inévitable. Mais son poids, lui, ne l’est plus. Avec les bons outils IA, chaque ligne de code devient plus lisible, plus documentée, plus fiable. C’est un changement de paradigme pour toutes les équipes qui, comme la mienne, ont trop entendu : « On n’a pas le temps. »
Maintenant, on a l’assistant qu’il faut pour trouver ce temps. Et peut-être, enfin, dormir sur ses deux oreilles.
TakkJokk